dimanche 2 juin 2013

la multiplication des conventions collectives en France, un bon filon mais pas pour les salariés

en France, les dispositions qui régissent la vie des salariés dans les entreprises sont issues de la loi, du Code du Travail, de la jurisprudence, des accords particuliers des entreprises et de 700 conventions collectives. Pourquoi cette hiérarchie des lois? Pourquoi un tel méandre? Sera-t-il possible de s'en sortir? 

bien entendu, avant de commencer, n'oublions pas les normes internationales (celle de l'Organisation Internationale du Travail) et les normes européennes auxquelles les lois de chaque pays de l'Union doivent se référer. 

à ces sources il faut ajouter 2 principes fondamentaux propres au droit du travail : 

  • le principe de l'ordre public social, qui veut que lorsque deux textes sont en concours sur un même domaine, il convient d'appliquer celui qui est le plus favorable au salarié. 
  • les conventions ou accords collectifs doivent être en conformité avec ceux des niveaux supérieurs (géographique ou professionnel)
cela signifie que les conventions ou accords collectifs ne peuvent pas être moins favorables que les lois auxquelles ils se réfèrent et que les contrats de travail doivent être plus favorables que les conventions ou accords collectifs (bien évidemment, puisque sinon ce serait trop simple, la loi a mis en place en face de toutes ces obligations des principes dérogatoires aussi nombreux que variés!)

l'Histoire des conventions collectives en France est jonchée de péripéties, issue de mouvements, marquée par le progrès sociale, le dialogue entre "patronat" et "syndicat" et est assez représentative des évolutions économiques de notre pays. 

la première convention collective est née suite à un conflit entre mineurs et compagnies exploitant les gisements de houille du Nord de la France. C'est en effet en 1891 que "patronat" et "syndicat" mettent fin à une grève à Arras et commencent à organiser les relations au travail. A partir de cette époque, les relations collectives vont réellement évoluer. Les salariés se structurent en syndicats (naissance de la CGT en 1895), le puissant syndicat de la Métallurgie est créé en 1901, un Ministère du Travail et la Prévoyance Sociale voit le jour en 1906 et le Code du Travail est rédigé à partir de 1910. C'est à partir de 1919 que l'Histoire des conventions collectives s'accélère, la loi leur donnant un cadre. Elles devront traiter de négociation collective, de représentation, de formation professionnelle, de conditions de travail... Elles peuvent être sectorielles ou géographiques. 

depuis lors, si le Code du Travail a connu quelques révisions remarquables (1973, 2008), le paysage social s'est considérablement structuré. Les syndicats de salariés de sont imposés comme des acteurs à part entière, le "patronat" s'est organisé et chaque métier jaloux de ses particularités et de son histoire a initié ses propres textes, ses propres organisations paritaires, sa propre convention collective. 

il est impossible de connaître le coût de ces 700 Conventions Collectives mais chaque Fédération a des locaux, des salariés, des frais d'impressions, de réunions, de déplacements, de représentations, du nombre de personnes nécessaires pour les étendre, pour les maîtriser, les contrôler dans les administrations du travail... Pour quel résultat? Les salariés sont-ils mieux protégés pour autant? 

compte-tenu du cadre qu'elles doivent respecter et de leur source principale (la loi), les textes des conventions collectives sont parfois tellement semblables qu'il est difficile de les distinguer. A contrario, les bizarreries du Droit du Travail font que des salariés travaillant pour la même enseigne, fabriquant les mêmes produits ou fournissant les mêmes services ne bénéficient pas de la même convention collective (le cas se retrouve souvent dans les enseignes à la fois exploitées en franchise et en succursales). 

difficile de ne pas penser qu'une simplification serait souhaitable. Difficile pourtant d'imaginer que celle-ci pourrait intervenir sans contrainte. Tous ces textes sont évidemment respectables si l'on se réfère aux combats qui ont été menés pour les rédiger, mais aujourd'hui, d'autres batailles doivent être livrées pour l'emploi, l'évolution des métiers, le renouvellement de nos industries... La multiplication des conventions collectives et des textes de loi en général fait perdre beaucoup trop d'argent, d'énergie, de temps pour pouvoir s'y consacrer pleinement. 

malheureusement, la défense des prés carrés, la position arc-boutée, la jalousie des financements qu'entretiennent les acteurs me rendent peu optimiste! 

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